Kundalini yoga, une technique puissante bouleversant la vie de ses adeptes
Considéré par certains comme le « yoga originel », le kundalini yoga transformerait corps et esprit pour le meilleur comme le pire. On l’a testé pour vous.
«Le kundalini m’a transformée.» Dans la grande salle au parquet brillant et murs immaculés du Studio Keller, dans le XIe arrondissement de Paris, Nafissa attend le début de son cours. Avec elle, une dizaine de pratiquants, hommes et femmes, posent tapis et briques pour une heure et demie d’un yoga peu commun. Ici, pas de salutations au soleil ou de chien tête en bas pour s’assouplir. On travaille l’esprit pour développer son potentiel et atteindre un «meilleur soi». Sur certains forums, d’anciens pratiquants se plaignent d‘incontrôlables montées de kundalini (l’énergie), de la peur de sombrer dans la folie ou d’insomnies. C’est donc avec une certaine appréhension que je me place en tailleur. Et si j’en sortais complètement perchée ?
Accéder à une autre dimension
La professeure Caroline Bénezet, une trentenaire à l’allure gracieuse aux cheveux attachés en chignon et à la tenue blanche près du corps, s’installe devant l’assemblée silencieuse. Elle branche son smartphone pour un cours où elle compte «stresser le corps pour le déstresser, car ce dernier a besoin d’être mis sous pression pour ensuite se relâcher».
Caroline a découvert le kundalini yoga pendant ses années de mannequinat à New York en 1997, elle enseigne la discipline depuis huit ans. Pour elle, c’est la meilleure forme de yoga qui existe : «cela a été la révélation. Dès le début, j’ai eu l’impression d’accéder à une autre dimension, ça a changé ma vie, développé mes sens, enlevé le voile que j’avais devant les yeux. Le kundalini relance le système nerveux, lymphatique et digestif. On revit», explique-t-elle.
Maîtrise de l’énergie sexuelle
Également appelé le «yoga de la conscience» ou «mère de tous les yogas», cette pratique a été exportée aux États-Unis par le maître indien Bhajan dans les années 1970. Si certains considèrent ce yoga comme originel, Caroline Bénézet estime qu’il s’agit plutôt d’une discipline développée à partir des postures de yoga les plus efficaces. À la fois spirituelle et physique, la pratique se baserait sur la maîtrise de l’énergie sexuelle présente en chacun de nous.
«Dès le premier cours, j’ai ressenti cette énergie traverser mon corps comme une onde de chaleur. J’ai senti un bien-être immense, une vibration et un rayonnement», se souvient Lili Barbery-Coulon du blog marécréation. La jeune femme a découvert la discipline il y a six mois, depuis elle pratique jusqu’à trois fois par semaine.
Déployée généralement pendant l’acte sexuel, cette puissante énergie partirait du sacrum et sa circulation le long de la colonne vertébrale éveillerait la conscience, le fameux troisième œil. Chaque cours veille ainsi à faire circuler l’énergie à partir de postures physiques et mantras chantés, «quand l’énergie atteint le cœur, on est dans « l’état amour », quand elle atteint le troisième œil, la conscience s’élève», précise Caroline Bénézet. De son côté, Lili Barbery-Coulon se dit «plus réceptive aux émotions, plus consciente des choses».
Libido et tonicité améliorées
La pratique serait également bénéfique «pour débloquer la libido notamment chez les femmes d’un certain âge. On ne ressentira pas forcément de pulsions sexuelles mais on peut avoir très envie de faire l’amour après un cours», souligne la professeure.
À voir le corps de liane de l’enseignante, on se demande aussi si ce yoga ne nous rendrait pas un peu plus tonique. «On travaille le système digestif donc forcément on perd un peu de ventre. Et puis on peut aussi travailler les abdominaux, les bras ou les jambes», précise Caroline Bénézet.
Respirations et postures
Au Studio Keller, Nafissa s’allonge en silence. Cette femme de quarante ans en est à son quinzième cours. « Je crée une gamme de cosmétiques, c’est beaucoup de stress. Avec le yoga kundalini je pense moins et mieux», dit-elle. Son meilleur ami suisse l’accompagne à chacun de ses séjours à Paris, «cela me permet de voir qui je suis, de mieux m’affronter. Dans la vie il faut se connaître pour avancer», explique-t-il.
La séance commence par des exercices physiques et respiratoires pour échauffer le corps mais également «harmoniser l’énergie du groupe», explique Caroline. On retient le souffle, on serre le périnée, puis on lâche tout. S’en suivent des exercices de respiration très rapides (deux ou trois par seconde) sans aucune pause, «la respiration du feu». Pour Lili Barbery-Coulon, ces enchaînements ressemblent aux entraînements de fractionnés en course à pied, où l’alternance d’efforts intenses et lents font travailler le cœur.
Après les échauffements, Caroline commence les kriyas, des séries de postures les yeux fermés, pour mobiliser la colonne vertébrale, les jambes, les bras… Chaque posture est ponctuée d’un court instant de relaxation pour en «intégrer les effets».
La puissance des mantras
Pour la troisième partie, Caroline se couvre la tête d’un turban blanc. Sur une musique aussi entraînante qu’hypnotique, les participants assis en tailleur effectuent des mouvements de main de l’avant vers l’arrière, comme pour jeter de l’eau par dessus l’épaule. En même temps, ils chantent un mantra en sikh. Est-ce l’émotion d’entendre une salle psalmodier, où l’effet puissant du kundalini, mais à chaque phrase prononcée, une irrésistible envie de pleurer me prend. Lili Barbey-Coulon m’avait prévenue, «je sors de chaque cours avec une grande euphorie, mais cela m’arrive de pleurer aussi, pas de tristesse mais une grande bouffée d’émotions».
On poursuit par deux autres exercices de méditation active de onze minutes. La professeure clôt le cours avec une courte séance de retour au calme allongée sur le dos et accompagnée d’une chanson folk. Je ressens une grande fatigue, j’ai envie de dormir.
Se défaire des addictions
À la fin de la session, les nouveaux prennent d’assaut Caroline Bénezet pour lui faire part de leurs ressentis : «j’ai eu envie de pleurer», «au début je voulais rire», ou «j’arrête de fumer et pendant le cours cela ne m’a pas traversé l’esprit». Ce type de yoga aiderait effectivement à éliminer addictions ou mauvaises habitudes, le maître Bhajan l’utilisait d’ailleurs pour guérir les toxicomanes. Lili Barbery-Coulon a réussi à se défaire de ses mauvaises habitudes alimentaires grâce à sa pratique : «J’ai perdu plusieurs kilos parce j’ai pris conscience de mon alimentation, depuis je me nouris mieux», explique t-elle.
Âmes sensibles s’abstenir
Puissant émotionnellement, le yoga kundalini est dit dangereux si mal accompagné ou pratiqué par des personnes sensibles. «Ce n’est pas un yoga qui se fait n’importe comment et avec n’importe qui. Comme tout ce qui touche à la psychologie, on ne peut pas faire confiance à n’importe quel psy ou faire n’importe quelle psychothérapie», illustre Lili Barbery-Coulon. Sur Internet, certains parlent de dépressions en raison de trop fortes montées d’énergies. «Il est possible qu’elle monte trop vite, cela m’est arrivée une fois. Je n’étais pas bien pendant deux semaines, j’ai ressenti certaines paranoïas», se souvient Caroline.
De mon côté, je n’ai ressenti ni la chaleur du kundalini, ni les portes de mon cerveau s’ouvrir ou mon troisième œil entre mes deux sourcils. Mais j’en suis sortie avec l’envie de revenir et l’impression d’avoir pris soin de moi.
http://madame.lefigaro.fr/bien-etre/le-kundalini-ce-puissant-yoga-qui-bouleverse-la-vie-de-ses-adeptes-030217-129536