20e Paurī du Jap Jī Sāhib
de Guru Nānak
Commentaires de Ram Singh Khalsa
« Quand les monstres vous pincent les talons, le 20e Paurī essuie au loin tous vos péchés. » – Enseignements du Siri Singh Sahib Yogi Bhajan (1)
« La séquence a une conséquence. Quand nous commençons une séquence, la conséquence sera là. Si vous ne voulez pas la conséquence, ne commencez pas la séquence.” ~ Le Siri Singh Sahib Yogi Bhajan. (2)
Une des principales expressions de la sagesse et de la clarté mentale est la capacité à percevoir les conséquences de nos pensées, de nos paroles et de nos actions, et agir (où se retenir d’agir) en accord avec cette perception. Le 20e Paurī du Jap Jī Sāhib nous donne une opportunité de méditer sur ce que l’on appelle samskâra: les conséquences de nos activités mentales et physiques (en particulier ce que nous répétons) et leur empreinte dans la psyché.
Le Siri Singh Sahib Yogi Bhajan a beaucoup enseigné sur les habitudes et a expliqué combien il est important d’apprendre à changer nos habitudes. Ce qu’il a signifié par habitude ce n’est pas seulement nos habitudes comportementales (toutes les choses que je fais et que je continue de faire) mais aussi les croyances récurrentes (spécialement celles qui ne me soutiennent pas), les réactions conditionnées, les pensées routinières et les schémas émotionnels. Il a même défini la méditation comme “l’art de briser les habitudes“ (3). Mais d’où viennent nos habitudes? Où sont-elles installées en nous?
“[Quand] l’émotion devient commotion et entre dans le mental subconscient alors il y a un problème. Alors vous avez un schéma, un style de vie. Et puis le schéma vous gouvernera. Ces commotions deviennent nos schémas, nous les appelons habitudes. D’abord nous créons une habitude, puis l’habitude nous crée. Il y a quasiment aucune personne qui n’est pas prise dans une habitude. Et il est très difficile de briser une habitude. S’il y a une mauvaise habitude, vous avez beaucoup de problèmes, la vie devient malheureuse .” ~ Le Siri Singh Sahib Yogi Bhajan. (3)
Le mental est une structure en multicouches. Ce que nous voyons ordinairement est pour la majeure partie à la surface de notre mental, ce que le Siri Singh Sahib Yogi Bhajan appelait le mental positif, et peut être aussi défini comme la “conscience ordinaire”. Mais la plupart de notre activité mentale se fait en dessous de la surface: comme un iceberg, la plupart du mental est en dessous du niveau de la mer. Cette partie en dessous de la conscience ordinaire est appelée subconscient. Le subconscient est certainement où les habitudes et les schémas sont enracinés, certains plus profondément que d’autres.
Il y a une forte interaction entre la surface – où les choses surviennent – et le subconscient. Peu importe ce qui arrive à la surface, cela provoque des émotions, des pensées et des impressions mentales, et si elles ne sont pas gérées ou traitées, elles doivent être stockées dans le subconscient juste comme nous avons tendance à stocker les vieilles choses à la cave au lieu de clairement décider si nous voulons les garder dans le salon ou nous en débarrasser. Maintenant que nous ne les voyons plus, nous pensons qu’elles ont disparu. Mais elles restent cependant actives et prennent beaucoup d’énergie et d’espace mental, polluant notre psyché, hantant nos vies. De telles névroses sont traditionnellement appelées les monstres ou les démons qui “pincent nos talons”. Et en retour, elles auront un impact sur ce qui arrive à la surface – comme des pommes de terre pourries à la cave sentiront éventuellement dans le salon! Et alors que très peu de gens prendront cela comme un signe qu’il est temps de nettoyer le niveau inférieur, la plupart des gens, pour de nombreuses raisons ( la peur, la paresse, l’ignorance) essaieront d’isoler un peu plus le niveau inférieur de la surface pour ainsi pouvoir essayer d’ignorer ce qui se passe en dessous. Mais cela arrive dans leur propre maison, dans leur propre espace mental, et cette corruption peut même attaquer les fondations du bâtiment: le Siri Singh Sahib Yogi Bhajan disait « Dieu, quand il commence à décharger dans l’inconscient alors tu l’as eu (4). »
kar kar karaṉā likh lai jāh(u).
Les actions que nous faisons et faisons encore finissent par “écrire” quelque chose.
Le mot likh signifie écrire et sa traduction originale est “graver” (probablement parce qu’avant d’écrire avec de l’encre et du papier, nos ancêtres gravaient des tablettes d’argile) ou “tailler”: notre mental et les activités physiques répétées encore et encore, laissent des rainures et des schémas dans notre mental subconscient, et bientôt nous avons très peu de choix si ce n’est de suivre ces rainures, vie après vie, même si nous savons qu’elles nous mènent au désastre.
āpay bīj āpay hī khāh(u).
De la graine (que nous plantons) nous devront manger (les fruits).
Peu importe la graine (bīj) que nous plantons, vertu ou négativité, bonheur ou misère, nous aurons à manger leurs fruits. En d’autres mots, ce qui arrive dans nos vies est le fruit de ce que nous avons installé dans notre subconscient.
C’est pourquoi ce Paurī commence avec la purification, avec le nettoyage. D’abord vient la pollution la plus superficielle, celle qui est facilement nettoyée:
Quand les mains, les pieds et le corps sont sales, l’eau peut laver la saleté.
Puis vient une pollution plus sérieuse et nous avons besoin de plus que de l’eau pour nous en débarrasser: Quand les vêtements sont tachés par l’urine vous avez besoin de savon pour les laver. Mais il est beaucoup plus difficile de se débarrasser de la pollution mentale. Quand l’intellect, la structure du mental, est corrompu par les méfaits, les erreurs, les émotions négatives, les pensées avilissantes ou les actions destructrices, alors nous avons besoin d’un autre type de purification: aimer le Nam, l’identité spirituelle, le divin infini que nous vibrons consciemment et au quotidien dans nos vies. L’amour du Nam n’est pas comme le savon, l’idée ici n’est pas juste de chasser au loin la pollution mentale. Nettoyer n’est pas suffisant, nous devons installer quelque chose de si grand, de si essentiel, de si ultime, qu’il ne laisse d’espace à aucun parasite, à aucune corruption. Guru Nanak nous invite à planter et à nourrir une autre sorte de graine dans notre subconscient: la graine du Nam. C’est la graine du Soi Véritable que nous sommes déjà et qui grandira comme un arbre grand et royal, avec les fruits dorés du bonheur et de l’accomplissement. C’est pourquoi cette répétition intérieure et silencieuse de Sat Nam est appelée bij mantra: le mantra qui plante la graine du Soi véritable à l’intérieur du mental. Et en Kundalini Yoga nous apprenons à planter, respiration après respiration: inspire méditant sur Sat, expire sur Nam. Sat Nam!
Bibliographie
1. Bhajan, The Aquarian Teacher, 80.
2. The Teachings of Yogi Bhajan, April 9, 2001.
3. The Teachings of Yogi Bhajan, February 21, 1978.
4.The Teachings of Yogi Bhajan, July 23, 1996.